Grinçant et hilarant, le chef d’œuvre d’Ernst Lubitsch s’attaquait dès 1942 à un sujet qui au premier abord ne prête pas à rire : le régime nazi d’Hitler. Tournant en dérision le Troisième Reich, To be or not to be (Jeux dangereux en VF) ridiculise la dictature nazie. Virulente satire contre la guerre, ce film reste près de 80 ans après sa sortie l’une des comédies les plus pertinentes, et les plus charmantes du cinéma américain.

Résumé
Une troupe d’acteurs polonais renommée doit arrêter sa pièce satirique antinazie lorsqu’Hitler envahit la Pologne. Les comédiens, menés par Maria Tura et Jozef, son égocentrique mari, jouent alors Hamlet. Lors d’une représentation, Maria fait la connaissance d’un soldat polonais tombé sous son charme. Les acteurs se retrouvent alors mêlés à la résistance. Chargés de déjouer l’attention des nazis, ils doivent arrêter un traitre s’apprêtant à dévoiler les noms des résistants aux nazis. Pour mener à bien leur mission, tous les moyens sont bons, si peu conventionnels soient-ils…

La troupe d’acteurs déguisés, essayant de passer inaperçue

En 1940, Chaplin s’attaque de manière virulente au régime d’Hitler avec son brillant Dictateur. En 1942, lorsque les Etats-Unis rentrent en guerre, le cinéma américain devient le porte-voix de l’idéologie du pays. Les années 40 voient donc naître de nombreuses comédies antinazies. To be or not to be fait partie de ces efficaces moyens de propagande, signé Ersnt Lubitsch. Au même titre que Franck Capra, Howard Hawks et Billy Wilder, Ernst Lubitsch est un réalisateur de comédies adulées par le public. Il a marqué la comédie américaine par sa patte : la « Lubitsch touch », mêlant grivoiserie suggérée, élégance et ellipses, entre autres. Son film antinazi, mené par Carole Lombart et Jack Benny, reste aujourd’hui son film le plus connu du grand public, bien qu’il ait souffert d’un cinglant échec à l’époque de sa sortie.

Une virulente satire

Ce film a l’intelligence de dépeindre les nazis en fonctionnaires fanatiques plutôt qu’en barbares belliqueux. Le résultat n’en est que plus réaliste et donc plus troublant. Les sbires d’Hitler se revendiquent être profondément humains alors qu’ils rient des camps de concentration.

A l’inverse de Chaplin, Lubitsch ne masque pas les noms des nazis et s’attaque frontalement à Hitler, ce qui lui sera reprochés par les critiques de l’époque. N’hésitant pas à tourner en ridicule les nazis, ce film se donne à cœur joie de dénoncer la politique expansionniste d’Hitler et le régime nazi dans sa globalité.

Une comédie efficace

To be or not to be/Jeux dangereux n’est pas seulement une critique cinglante du régime nazi, mais aussi un sommet de comédie, subtile et rythmé. Dès la première scène du film, le spectateur assiste amusé, à des dialogues de haut vol. Ironiques à souhait, virulents et travaillés, les dialogues fins de To be or not to be figurent parmi les plus brillants qu’il m’est été donné d’entendre.
On se prête facilement à sourire, voire à rire parfois lors de scènes comiques empruntant autant au muet qu’aux comédies contemporaines du film. Le comique de répétition est diablement efficace et les situations rocambolesques s’enchainent pour notre plus grand plaisir. Quiproquos et double sens rythment ce film au charme indéniable.

Les comédiens devenus résistants se griment en nazis pour retrouver le traitre, cette mise en abîme donne lieu à des scènes réjouissantes, à l’instar des moments où Jozef Tura, interprété par un Jack Benny en grande forme, doit jouer le fameux traitre et s’emmêle dans des dialogues à double sens. L’égocentrisme de ce personnage ridicule est exploité de manière récurrente et sont souvent d’excellents moments de comédie. Jack Benny excelle dans ce rôle d’homme d’une jalousie maladive et d’un orgueil démesuré. Face à lui, Carole Lombart lui tient tête avec autant de drôlerie et de légèreté. Ce film sera son dernier rôle, puisque la femme de Clark Gable mourra dans un accident d’avion quelques mois avant la sortie du film.

Jozef Tura et sa modestie légendaire

En bref
Drôle et parfois émouvant, To be or not to be est un divertissement efficace, élégant et intelligent. Les dialogues mémorables portent la critique féroce de Lubitsch, tandis que les scènes de comédie pure restent près de 78 ans après leur création aussi réussies. Chapeau bas à Lubitsch et à sa troupe d’acteurs inspirés qui portent ce film au scénario élaboré en lui offrant un charme fou.

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