Rares sont les films dont on ne voudrait pas qu’ils voient le jour. Si Promesse sort en salles, c’est parce qu’une jeune femme, avant de mourir, à faire jurer à son frère jumeau d’utiliser les images d’archives retraçant ses dernières années. Documentaire collectif, Promesse rassemble une famille endeuillée qui accepte, avec une franchise désarmante, d’évoquer la longue maladie de Laurène, et son décès, à vingt-deux ans. Si formellement le film tâtonne, la sincérité de ce projet foudroie.
Laurène Hug de Larauze meurt en 2016, six ans après le diagnostic d’une leucémie, après une greffe de moelle osseuse, après une greffe de poumons. Durant ces six ans, le clan familial fait lutte, ensemble, autour d’elle. La fratrie de cinq enfants se réunit dans la chambre stérile d’hôpital, les parents se relaient à son chevet. Ce douloureux parcours est jalonné de moments d’espoir, et d’injustes retours en arrière, jusqu’à la mort de Laurène, après trois mois de complications causées par sa dernière greffe. La famille Hug de Larauze n’a cessé de filmer le quotidien de Laurène, de documenter chaque étape, et elle-même s’empare de la caméra pour raconter son parcours, ses craintes, sa rage.
Le frère jumeau de Laurène, Thomas, n’arrive à voir ces images que deux ans après le décès de Laurène. Or il doit tenir sa promesse, et se lance dans le projet de long-métrage. Les films familiaux et les confessions face caméra de sa sœur sont complétés par de courtes séquences animées symboliques sur l’avancée de la maladie, et surtout, par des entretiens avec chacun des membres de la famille.
Alors que le début du film annonce la présence des vidéos créées par Laurine, celles-ci n’apparaissent qu’en dernière partie du film. Le réalisateur choisit un régime d’images plus traditionnelles (entretiens et films familiaux) qui visent juste du côté de l’émotion, mais surprennent moins formellement. De ce fait, la présence des confessions filmées de Laurène tranchent peut-être trop brutalement avec le reste du film, alors qu’elles constituent une voie formelle nouvelle pour le documentaire, pas très éloigné de formats YouTube. Or cette hybridité des formats intéresse moins le réalisateur, qui préfère une introspection intime, familiale et émouvante. Il faut bien avouer que de ce côté-là, le pari est tenu.
Thomas Hug de Larauze laisse affleurer la parole de ses proches qui révèlent, ou découvrent par la parole même, leur appréhension de la maladie de Laurène. Promesse finit par interroger des situations universelles, des schémas sociaux. Un père a-t-il le droit de pleurer ? Un frère peut-il préférer une sortie avec ses potes plutôt qu’une visite à l’hosto ? Les membres de la famille évoquent des souffrances souvent tues dans les récits sur la maladie. Ainsi, la mère de Laurène avoue cette douleur paradoxale de la rémission de Laurène, qui met fin au lien si singulier qui les unissait à l’hôpital.
Et, dans chaque image, dans chaque parole, Laurène. Si lumineuse, si franche, si atrocement lucide. Laurène racontée par les autres, et Laurène qui se raconte. Depuis les débuts du cinéma, le septième art fut le refuge des fantômes, et tous les films, des promesses. Celle-ci vous déchirera le cœur.